Lysefjorden Inn 2023 (3 juin 2023)

La course est derrière moi depuis presque deux mois et la « potentielle » prochaine se profile à l’horizon le mois prochain.

Mais ne grillons pas les étapes et il faut pourtant prendre le temps de repenser a ce qui s’est passé ce 3 juin, la première étape de mon challenge personnel autour du Lysefjord. Mais j’y reviendrai sans doute plus tard.


Tout commence avec une préparation perturbée à cause d’un mal au dos aussi soudain que persistant en février dernier. Deux mois sans course à pied et une reprise progressive en avril pour me retrouver ce 3 juin dans un état de préparation incertain pour le moins. Comme d’habitude j’aime arriver tôt le jour de la course pour être sûr de pouvoir me garer et récupérer le dossard sur place. 

Quizz sans récompense pour commencer : le compteur du nombre d’inscrits est resté bloqué quel chiffre ?

  • Réponse A : 2394
  • Réponse B : 104
  • Réponse C : Aucun des deux car il suffit de venir le jour de la course et c’est parti sans inscription.
  • Réponse D : la réponse D

Solution : Réponse B 😜 Un chiffre ridicule pour une course locale en France mais une participation tout à fait normale pour la Norvège.

C’est donc en compagnie de mes 103 compagnons du moment que je m’élance à 08:30 précise en ce samedi 3 juin. 

Les 7 premiers kilomètres ne sont pas particulièrement enthousiasmants. Du bitume en montée, en bordure de route. Heureusement peu de voiture à cette heure du week-end. Cette partie sans grand challenge nous vaut tout de même une belle vue sur l’entrée du Lysefjord.

Il est pas beau le Lysefjord ?

[KM 7]  Il est temps de quitter le bitume et la « civilisation » pour s’aventurer dans la nature (hostile ?). Je retrouve là le terrain que je connais bien : une alternance de parties très rocailleuses et de passages boisés. Ni l’une ni l’autre ne permet de réellement courir librement, le risque étant trop grand de (1) se vautrer lamentablement et (2) se casser une partie essentielle de son anatomie. Il s’agit donc pour l’essentiel de phases – trop courtes – de course et de portions – trop longues – de marche rapide en restant 200% concentré. Le tout étant bien évidemment agrémenté d’une pente qui, sans s’apparenter à une « montée impossible », se révèle être un challenge suffisant.


[KM 11.5] Pas de vue à couper le souffle, ni de pente « himalayenne » ou de bête sauvage à mes trousses à ce point de la course. Pour autant je me rappelle parfaitement le KM 11.5… Le temps en ce samedi est parfait et les jours précédents l’ont été tout autant. C’est donc sans crainte que je m’apprête à « passer » une zone de terre sombre à une allure qui, au vu de la vitesse moyenne sur la course, peut être qualifié de rapide. Mon élan est pourtant brisé net, si j’ose dire, dès la première foulée. La terre sombre se révèle être une tourbe qui, égoïstement, a gardé suffisamment d’humidité pour la rendre souple, très souple voire très très souple. La jambe gauche se retrouve engluée jusqu’au genou et la droite, décidant d’imiter sa voisine par solidarité sans doute, s’enfonce jusqu’à mi mollet… 

En 1/1000 de seconde, les questions fusent. Ma chaussure va-t-elle rester engluée dans 40cm de tourbe ? Quid de l’autre qui n’est qu’à 20cm sous la surface désormais ? Où se trouve le cours d’eau le plus proche pour tenter un rinçage d‘urgence ? La prochaine étape va-t-elle me mener la face dans boue ? Autant dire que je me voyais déjà à genou entrain de tenter de récupérer une voire les deux chaussures, les mains dans la boue. Le tout en 1/1000 de seconde je le rappelle.Heureusement pour moi et mon ego, le système de stabilisation interne est bien fait et capable de faire des miracles. Il m’évite ainsi un retamage en règle. Après une seconde d’interrogation, c’est dans un bruit de succion assez degeu que mes jambes ressortent de leur gangue. Oh la belle couleur marron foncé ! Mes manchons de compression, d’un joli bleu éclair quelques secondes auparavant, sont désormais revêtus de la couleur marron pour le moins « suspicieuse ».

Note : je viens de me rendre compte que je viens de passer un paragraphe entier sur un micro-évènement qui n’a duré qu’un instant 🙂 C’est quoi déjà l’histoire de la confiture qu’on étale… ?

Me voilà reparti avec en point de mire le premier point de ravitaillement, situé au Prekeistolen Lodge. En fait le ravito n’est qu’à un peu plus de 1km d’après la montre, une broutille au vu de la distance du jour 🙂


[KM 12.8 – 10:29] Arrivée au Lodge. Je dois dire que le ravitaillement qui nous accueille est tout à fait correct, même pour des standards français, ce qui n’est pas toujours le cas en Norvège. Je me rappelle les ravitaillements minimalistes lors de l’Ecotrail d’Oslo en 2018 où on était sur du « eau-banane-basta ». Ici du sucré (chocolat, bonbons, bananes) et du salé (Tuc) en plus d’eau et d’une boisson énergétique « suspicieuse ». 

4 minutes d’arrêt et je repars de la tente avec les flasques remplies et le plein de calories fait. Ce qui m’attend dans l’immédiat est plutôt bien connu avec mes 11 montées au Prekeistolen au compteur (genre je fais le malin). On n’ira pas jusqu’au rocher cette fois puisqu’on quittera le chemin avant mais on pourra bénéficier de l’essentiel des difficultés. 

Dès la première montée, je double les premiers randonneurs qui n’en sont qu’au tout début (du calvaire pour certains). Ils font très certainement partie des passagers d’un bateau de croisière amarré a Stavanger. Ça parle espagnol, allemand, français voire même norvégien pour ce dont je me rappelle. J’imagine leur surprise et/ou leur interrogation alors que nous les doublons, en tenue de trail et sac à dos minimaliste. Certains sont pour leur part parés pour une rando de plusieurs jours à voir la taille de leur sac dos alors que d’autres ont adopté la tenue pour soit sortir le chien soit faire les courses (jean, sandale de ville, no-sac-a-dos), aucune des deux n’étant recommandée pour cette « sortie ». Ils arriveront tous à destination certainement mais au prix d’un inconfort certain pour les uns et d’une débauche d’énergie pour les autres. Assurément un souvenir mémorable !!

Quant à moi je gravis les escaliers de pierres, arrangés par des sherpas il y a quelques  années afin de « faciliter » l’ascension, avec des hauteurs de marche qui dépassent les 30cm par endroits tout de même. Faut de la cuisse bon dieu !!

Juste avant Tjødnane, que tout le monde connait forcément (…), je quitte le chemin maintes fois gravis pour attaquer une partie en légère descente totalement inconnue. C’est le point de départ d’une partie qui devrait alterner légères montées et descentes (Roller Coster, yeah!) pour m’amener quelques 17 km plus loin après une partie en descente sévère au deuxième point de ravitaillement a Songesand. Tel est le plan… 

Pour l’instant il s’agit surtout de regarder, encore et toujours, où je mets les pieds car les pierres et autres racines sont de retour, plus que jamais. Ce n’est décidément pas le terrain que je préfère mais il n’y a pas vraiment le choix… Jusqu’a présent, hormis l’Ecotrail d’Oslo, le terrain s’est toujours révélé peu propice au rythme de course. C’est sur une partie en descente qu’un duo de français (j’apprendrai plutard qu’il s’agit d’un père et de son fils) me double, visiblement plus à l’aise dans sur ce terrain. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot…

Heureusement que la vue sur le fjord fait passer la pilule. Et quelle vue ! Je découvre à cette occasion le mini Prekeistolen 🙂


[KM 27 – 5H27 de course] Arrivée au deuxième point de ravito à Songesand j’en ai fini avec les pierres, racines et autres embuches. Et quand je dis pierres, je dis grosses pierres !

Allez trouver le chemin au milieu de tout ça ! Il faut un peu faire à l’intuition et trouver les T rouges… mais ça passe. Ravito classique ici encore où j’engloutis Tuc, chocolat et quelques bonbons sans oublier de faire le plein des gourdes. 5 minutes encore pour ce stop et je repars.

Sur la carte les 5 prochains km promettent un mix de route de campagne et de sentiers, en montée constante. Rien de bien folichon en définitive avec une alternance de course et de marche rapide. Sur les parties dégagées j’ai en point de mire le duo de français que j’avais rejoint au ravito #2 et qui était reparti un peu avant moi. La distance se réduit même un peu au fil du temps. Grrrrr !!


[KM 38 – 7H30 de course] Le combo pierres/racines refait son apparition. Le rythme ralentit un peu pour absorber les difficultés du revêtement. C’est d’ailleurs à la faveur d’une partie en légère montée que je double mes compatriotes 🥳 

Poussant un peu plus loin, le paysage qui s’offre s’apparente alors à un cirque, tel un Gavarny norvégien. Un coup d’œil rapide sur la carte (téléphone) me confirme ce que soupçonnais à la vue du terrain : il va falloir y aller « azimut-sanglier » pour rejoindre ce qui doit être le troisième et dernier ravitaillement. Qu’il en soit ainsi…

J’en profite pour jeter un coup d’œil en arrière, histoire d’évaluer mes chances de me faire rattraper – ou pas – par le duo tricolore. Rien à l’horizon, ça devrait passer. En avant donc. 

La zone s’avère rapidement plus humide que précédemment, sans doute en raison de la présence d’un lac tout proche. La montée tant attendue ou redoutée est désormais toute proche.

Un pied devant l’autre, penché en avant, le regard scotché 50cm devant moi. C’est ainsi que je gravis la pente en pensant à la pause du ravito qui m’attend en haut. 15 minutes peut-être et je souffle. Ça monte, le cardio en fait de même, les cuisses brulent un peu. Le duo 🇫🇷 n’est pas en vue. Il ne me rattrapera pas, c’est sûr. Quelques traces de neige font même leur apparition et je ne manque pas d’immortaliser cet instant. Rien qui ne gêne vraiment la course mais juste pour le fun.

La couleur originale des chaussure est… gris clair.

Enfin la présence de la route bitumée marque la fin de la grimpette. Le miam n’est pas loin. Mais où peut-il bien être? Pas une voiture, pas une tente. Rien. Un coureur qui me précéde d’une cinquantaine de mètres va à droite, à gauche et décide visiblement de continuer sur la route. 

Mais où est ce fichu ravito !! J’observe les alentours et rien n’indique un quelconque point de repos. Il faut donc se résoudre à continuer en espérant trouver ce 🤬 rapidement. Je sais que les derniers 15 km sont du bitume et ce n’est clairement pas la partie la plus fun. Le rythme est bien sur plus rapide mais cet ultime checkpoint qui se fait attendre change la perception du temps qui s’écoule. 

Ce n’est que 1.3 km plus loin que je tombe, au détour d’un virage, sur une table servie par deux volontaires. Enfin ! Ultime remplissage des flasques, prise de chocolat et c’est parti pour le dernier tronçon. Comme anticipé ce n’est pas la partie la plus difficile physiquement, car en descente, mais le goudron n’est pas la surface idéale… Le paysage est tout de même agréable il faut bien l’avouer.

La course se termine par une ligne droite d’un bon kilomètre où on a le temps de voir se rapprocher l’arche d’arrivée. Le speaker annonce alors le nom des finishers et un organisateur remet la médaille (un peu cheap je l’avoue) autour du cou.

Finito. Done. Check. La course est derrière moi. 60 km (ou 62 selon l’organisation) et 2500 m de dénivelé positif.

Les jambes feront sans doute un peu mal demain et les jours qui suivent, surtout en descendant les escaliers. Il faut maintenant se changer et profiter d’un burger 🍔 voire d’une pølse 🌭 offert par l’organisation (j’ai pris les deux). Le ferry est dans 30 minutes. Il nous ramènera à Oanes, lieu du départ de la course. Je récupère mon sac d’allègement et passe des affaires propres et sèches. A 19 heures passés en ce début juin la température est un peu fraiche au bout du fjord. La veste polaire est la bienvenue. L’heure du ferry approche et les quelques dizaines de coureurs présents, dont je fais partie, se dirigent d’un pas parfois lourd vers l’embarcadère. Le ferry arrive et tout le monde se vautre dans les fauteuils non sans avoir pris au passage un café ☕️ gratuit (les connaisseurs apprécieront le détail). 45 minutes de voyage dans le fjord à repenser, un peu, à la course mais surtout à rien…

Le reste ne sera qu’affaire de récupération et de reprise progressive de l’entrainement pour une éventuelle course en août. L’avenir nous le dira…


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